D'été en Sicile, La mer a toujours la couleur du saphir

D'été en Sicile, La mer a toujours la couleur du saphir, traversée par les dauphins et espadons. Depuis toujours.




Larmes de lave, des plaines de calcaire battues par le vent, des landes ensoleillées couleur du bronze: chacune des îles orne le littoral sicilien comme un fil de perles orne le cou d'une belle femme. Elles sont quatorze les filles de la Sicile, pour ne pas parler de Mozia qui lors de la marée basse s'unit à la côte de Marsala. Quatorze paradis de beauté non contaminée. Certaines au charme de l'Afrique, comme les Pelagie, dans la province d'Agrigento, et Pantelleria dans la province de Trapani.
D'autres, en revanche, dames incontestées de la mer et de ses secrets comme Levanzo, Favignana
et Marettimo: l'archipel des Egadi dans la mer de Trapani. Plus au nord, dans un isolement splendide, se trouve Ustica, l'Ile de Circe, avec sa réserve marine intacte. Alors que dans les Eoliennes, dans la province de Messina, se donnent rendez-vous l'eau et le feu.
Ici, en somme, c'est encore la nature qui dicte ses rythmes et au voyageur il ne lui reste qu'à se laisser enchanter par les atmosphères magiques des pêcheurs et des agriculteurs des îles, derniers conservateurs des antiques traditions de la Méditerranée.
A vous le choix entre les mondanités éoliennes, les silences des Pelagie ou les parfums des Egadi.

La vie en Sicile
Pas de doute, nous sommes bien en Italie. Et le modèle culturel de référence est bien l'Europe... Mais ici quelque chose de spécial flotte dans l'air, vraiment spécial ... Un Italien du continent ne se sent qu'en partie chez lui, l'autre partie se retrouve dans un autre monde quand il vient en Sicile. Tout comme l'amoureux universel de l'Italie qui, bien sûr, trouvera en Sicile la fascination de l'Italie éternelle, mais sera étonné des nombreux particularismes siciliens.
Tant qu'au bout du compte ils finissent par composer une différence irréfutable entre l'île et le continent.

Catania
L'éléphant de la Piazza Duomo, emblème de la Ville

Probablement sculpté en un seul bloc de lave en époque byzantine, cet éléphant prend étrangement la place de Saint Georges sur la place dés le 13° siècle. D'un point de vue ésotérique, cette incroyable substitution affirme l'attachement de Catania à ses racines d'avant le Christianisme. Cela est plutôt rare dans le contexte de l'Europe médiévale. Et en Sicile Catania n'est pas un cas isolé en la matière: Erice n'a renoncé à son culte fameux d'Aphrodite qu'au 13° siècle.

L'éléphant pour les Catanais porte un nom , "u Liotrù", en réminiscence d'un puissant mage du 8° siècle de notre ère, Eliodore, qui mit tout son art à résister au despotisme du Christianisme d'alors. Mais la légende veut qu'il ait été vaincu par une magie plus forte que la sienne, celle de l'évêque Saint Léon le thaumaturge, qui l'ayant entraîné à sa suite dans un feu ardent en sortit seul.


Les Catanais cependant se sont convaincus que l'éléphant puisse être comme habité par l'esprit d'Eliodore qui utilisait dit-on cet éléphant comme monture. Il est dés lors passionnant d'analyser sa substitution sur la place principale à un autre grand thaumaturge chrétien, Saint Georges, grand pourfendeur du Mal symbolisé par le fameux dragon du bestiaire médiéval.

Mais cela ne suffit pas encore ! en 1733, le Palermitain Giovanni Battista Vaccarini oeuvre à la reconstruction de Catania après le tremblement de terre de 1693. La cathédrale et l'église de Sant'Agata alla Badìa sont les premiers chef d'oeuvres de cet architecte qui deviendra le symbole même du baroque Catanais. L'installation du "Liotrù" est immédiatement successive à ces travaux. Et comme toujours l'oeil profane regarde et ne voit pas. Pour l'initié en revanche il est clair que ce monument ne se contente pas d'exposer, comme le dit la version officielle, les trois âges de la Ville.

Et cela rend la lecture de l'architecte Vaccarini,prélat de son état, bien plus complexe que celle d'un simple élève talentueux de Borromini...